Conques, sanctuaire de la bénédiction !
L’écrivain Prosper Mérimée et inspecteur des monuments historiques avouait en 1837, n’être « nullement préparé à trouver tant de richesses dans un pareil désert ». Il parlait certainement du village de Conques, de l’abbatiale et de son trésor millénaire. Aujourd’hui je veux reprendre ces mots et les faire miens.
« … dans un pareil désert » Spontanément ce n’est pas l’image d’un désert qui me venait à l’esprit en pensant au prieuré de Conques. Il est vrai qu’avant d’y poser mes valises en août dernier, je ne connaissais de Conques que son ébullition estivale : pèlerins, visiteurs, scouts… Maintenant, après un hiver, un printemps et un confinement, je peux m’unir à l’exclamation de Mérimée. La splendeur de Conques est une union, peut-être même une communion entre cette nature sauvage et le génie humain qui a bâti cette église romane. Le chœur des frères, le chœur des oiseaux, des arbres, de la roche font s’élever une même louange au Créateur. C’est là le fondement, le roc de notre vie ici, le lien spirituel qui nous relie à Dadon et aux moines bénédictins qui vécurent ici.
« …tant de richesses » Le trésor et ses reliquaires, le tympan, les chapiteaux historiés… contribuent à l’accroissement des richesses de l’abbaye de Conques. Non pas au sens matériel ou pécuniaire mais humains parce qu’ils attirent en ce lieu une foule immense. Ces richesses nous les recevons dans divers lieux de notre monastère : l’église abbatiale, l’accueil des pèlerins et la boutique.
Cinq, dix, vingt voir trente ans sans confession. C’est l’aveu, une confidence que j’ai déjà entendu plusieurs fois l’été dernier. Mais pourquoi ici et maintenant ? A cause de la marche et de l’arrivée dans un lieu aussi beau que Conques. Ainsi, j’ai dans la mission de chapelain l’une des plus belles grâces qui m’est faite, celle de contempler les richesses, les merveilles du Dieu à l’œuvre dans les cœurs. C’est la beauté du chemin de Saint-Jacques, nous récoltons ce que d’autres ont semé et nous semons dans la confiance. Le service de l’écoute va de pair avec le service de la table. Mettre un tablier est servir les pèlerins avec les hospitaliers incarne en quelque sorte le ministère de l’écoute. C’est prendre soin de la personne dans sa totalité esprit, âme et corps. S’assoir à table avec les pèlerins au petit déjeuner permet de recueillir une dernière intention de prière et d ‘offrir une ultime parole d’encouragement pour le la suite du chemin, pour la vie peut-être. Notre vocation est d’offrir tout cela à Dieu durant l’office divin en reconnaissance pour toutes ses bontés.
L’autre lieu de passage est la boutique de l’abbaye. Depuis que j’ai commencé ce service je me suis rendu compte que c’est à la fois un travail et un ministère. Le travail est passionnant, riche en rencontre : clients, représentants, pèlerins, touristes, paroissiens voir même de grands artistes. La vente d’un livre, d’un souvenir, d’un objet de piété n’est que la dernière étape d’une rencontre. Car s’agit effectivement d’une rencontre, parfois brève comme quelques mots griffonnés sur une carte postale. C’est aussi entrer plus avant dans la connaissance de l’autre pour offrir un conseil ou encore se laisser entraîner dans une discussion littéraire avec un parfait inconnu. La merveille des merveilles c’est aider quelqu’un à choisir une Bible et lui offrir quelques clefs pour la recevoir comme la Parole de Dieu. Ici encore bien des confidences et des intentions de prière sont déposées.
« Bénédiction » est le mot qui résume de mon point de vue l’ensemble de la mission dans ce haut lieu. La bénédiction au sens sacramental occupe une grande place dans le sanctuaire : bénédiction de pèlerins, des promesses scoutes et la bénédiction des objets de piété mais elle s’étend plus largement à chaque fois que des paroles de bien sont échangées, offertes et ultimement lorsque nous parlons de Jésus-Christ sauveur notre unique est souverain bien.
Oui, les mots de Mérimée sont justes, aujourd’hui ils dépassent certainement son expérience mais vont si bien à ma découverte de Conques car je n’étais « nullement préparé à trouver tant de richesses dans un pareil désert »
Frère Arnaud